Direct Soir,le gratuit qui n'a rien à vous dire
Direct-soir, le support gratuit - journal est un bien grand mot - lancé par Vincent Bolloré, invente un nouveau concept : celui de l'éditorialiste-stagiaire. Dans son édition datée du vendredi 23 juin, c'est un jeune stagiaire de 18 ans, Olivier Palle, qui s'y colle sous la tétière "EDITO". Mazette ! Une vraie bonne idée, pour le coup !
Jusqu'à présent, l'éditorialiste était un journaliste aguerri, rôdé à la vie politique intérieure ou aux dessous de la géopolitique étatsunienne, un sociologue de l'instant au vieux cuir journalistique blanchi sous le harnais du faits divers/fait de société ou de la chronique judiciaire, un observateur avisé des moeurs du microcosme... Mais l'éditorialiste est aussi bien plus que celà. Il est surtout la voix officielle, l'opinion affichée du titre pour lequel il travaille. Il engage la responsabilité toute entière du journal, au point que nombre d'organes de presse ont longtemps affiché leurs éditoriaux à la UNE.
PARFOIS L'EDITORIALISTE S'EMPORTE
Bref, ce n'est pas rien, et n'accèdent en général à cette fonction de commentateur officiel que les journalistes d'abord dotés d'une bonne plume et - surtout - dont l'opinion est évidemment en phase avec celle du directeur de la rédaction.
La tendance générale étant à l'alternance droite-gauche (tant en politique que devant les tribunaux), l'éditorialiste se révèle le plus souvent "centriste" dans ses idées et conservateur, bien qu'il s'en défende. L'éditorialiste de province a du sens politique, ce qui lui permet de ne pas s'aliéner la moitié de son lectorat. Tandis que le parisien se dit "de-gauche" ou "de-droite", mais professe le plus clair de son temps l'inéluctabilité libérale des mouvements du monde.
Parfois il s'emporte et se lâche : ainsi Serge July l'an dernier face aux "nonistes" (ce qui laissa perplexe, voire fâchés quelques lecteurs "de gauche") ou d'autres dont on trouvera ICI les excès de plume.
REVELATION INCONSCIENTE
Rien de tout celà dans Direct-Soir. Et c'est bien là le coup de génie, la révélation inconsciente des dirigeants du titre. Ce "journal" se contrefout d'ouvrir un débat de société, de mettre en perspective un événement ou d'afficher des idées. Non, il faut plaîre, plaîre et encore plaîre... surtout aux annonceurs. Direct-Soir n'a donc rien à dire à ses lecteurs.
Dans ces conditions, son rédacteur-en-chef nous le démontre par l'absurde, on peut tout aussi bien confier l'éditorial à un stagiaire.
A lire celui-ci, on comprend mieux la vacuité du propos éditorial du journal en question.
Extraits de l'édito :
"Tous les jours, toutes les heures, chaque minute, chaque seconde, le monde avance, ses habitants avec (...)".
"Etre riche ? Pourquoi pas ? Mais visez encore mieux : devenez un héros, atteignez les sommets et gravez votre nom sur le rocher de l'humanité"
"Votre destin n?est pas écrit, il n'est que préfacé" (c'est ma préférée citation).
(A lire : l'intégralité de l'éditorial)
Le jeune Olivier Palle n'y est pour rien, pas d'attaque ici contre sa personne. Simplement son texte est creux à l'image de Direct-Soir. On est ici dans l'idéologie du "temps de cerveau disponible".